Pourquoi l'appellation "Cacao de Cérémonie" est apparue ?

Savez-vous ce que signifie réellement l’appellation « de cérémonie » ? Cet article vous aidera à comprendre ce que ce terme désigne, mais aussi pourquoi et comment il est apparu.

Pour répondre à la question que cet article soulève, nous donnons d'abord une brève introduction au concept de "Cacao de Cérémonie". Nous explorons également les raisons de l'apparition de ce terme spécifique, présentons Keith Wilson (connu pour avoir été le premier occidental à travailler avec le cacao comme plante médicinale, et à avoir inventé le terme « de cérémonie ») et partageons notre point de vue sur la façon dont le marché évolue autour de cette appellation. Enfin, nous partageons une partie de notre réflexion sur l'utilisation de cette désignation.

Qu'est-ce que le "Cacao de Cérémonie" ?

Si vous cherchez une réponse approfondie à cette question, je vous invite à lire notre perspective complète dans cet article. Le but de ce paragraphe étant de donner suffisamment d'éléments de contexte pour discuter par la suite de l'utilisation du terme "cérémoniel".

Cette question est essentielle et reçoit souvent des réponses assez variées, en fonction de la façon dont on l'utilise, de notre expérience avec le cacao et des connaissances disponibles. Si nous ajoutons à cette connaissance subjective et expérimentale, les questions techniques de génétique du cacao, de sa culture, du processus de fabrication etc… Il devient alors facile d'imaginer l'envergure que peut prendre cette définition !

— À l'origine, il n'était pas nécessaire de qualifier le cacao de "cérémoniel" car il faisait pleinement partie de certaines cultures et traditions mésoaméricaines et sud-américaines. L'aspect cérémoniel, ou sacré, était inhérent au cacao. Mais la plupart de ces traditions ayant été décimées, oubliées ou à peine maintenues en vie, une désignation a dû apparaître pour clarifier un concept. Un concept qui a lui-même dû être introduit, se frayant un chemin entre héritage culturel et pratiques contemporaines.

Une définition ouverte

De notre point de vue, dire que le Cacao de Cérémonie « ne devrait » répondre qu’à une certaine définition serait limitant. Nous pensons qu'il est important de garder une définition ouverte, d'être curieux et de s'informer sur ses origines, afin de comprendre avec justesse ce qu'il représente.

Au lieu d'une description figée nous pensons qu'il est possible de définir un cadre. Ce cadre peut ensuite être développé ou affiné, grâce à des critères pertinents. La souplesse est de mise.

Par exemple, le cadre que nous avons défini pour un cacao désigné comme étant "de cérémonie" serait :

Une pâte pure, composée à 100% de fèves de cacao,
Respectant les traditions héritées des cultures mésoaméricaines ou sud-américaines concernées,
Transformé artisanalement et de façon minimaliste,
Fabriqué et partagé avec intention.

Nous partageons volontairement cette description assez large, pour que vous gardiez à l'esprit que le "Cacao de Cérémonie" est une appellation très récente et que, de notre point de vue, Il y a encore beaucoup de place pour la discussion concernant son usage.

Pourquoi la désignation "Cacao de Cérémonie" devait apparaître ?

Avant de répondre à cette question, rappelons que le cacao, tel qu'il est décrit ici, n'est pas et n'était pas une boisson banale. Pour le comprendre pleinement, nous devons faire évoluer notre vision globale de l'alimentation et accepter l'idée que tout ce qui nous entoure — et donc tout ce que nous mangeons et buvons— est composé de différents éléments ayant un impact sur notre corps et notre esprit, et ce sur différents niveaux.

— Par exemple, notre santé, plus précisément notre physiologie, fluctue selon nos apports en minéraux, vitamines, molécules, composés actifs… C'est un phénomène largement accepté et facilement mesurable. Pour autant, des niveaux plus profonds, psychologiques, voire spirituels, pourraient tout aussi bien être impactés par ces mêmes apports.

Aujourd'hui, nous savons que la plupart des civilisations anciennes ont expérimenté les plantes et les aliments depuis une approche holistique. Ainsi, lorsqu'elles ont expérimenté le cacao, elles ont pu mesurer le potentiel que cet aliment avait à offrir.

Le cacao, consommé sous forme d'une pâte pure et peu transformée, a des effets sur le corps et l'esprit, tout comme ceux bien connus du thé ou du café. Ces effets ont certainement permis au cacao d'atteindre son statut sacré au sein des peuples l'ayant domestiqué. Dans ce contexte, il n'était pas nécessaire de le qualifier avec adjectif supplémentaire ou de lui donner un titre spécial. Le cacao, tel qu'il était, avait sa propre importance dans les traditions, les sociétés et les spiritualités qui lui étaient associées.

Une fois ces civilisations colonisées et leurs cultures bafouées, l'essence du cacao et son statut sacré furent réprimés. Rapidement le cacao est relégué au rang de simple ingrédient du chocolat. La transmission de connaissances sur ses origines, sa consommation, ses effets et ses bienfaits pour la santé s'amenuise, jusqu'à l'oubli.
L'intention à l'origine de l'usage du cacao disparaît.

— Une pensée qui paraît assez folle lorsque l'on considère son histoire : l'état de la recherche nous permet aujourd'hui de retracer sa domestication et sa consommation en boisson à environ 5300 ans — alors que cet aliment a seulement été introduit en Occident il y a 400 ans, et que les prémices d'une substance solide ressemblant à notre barre de chocolat contemporaine datent eux de seulement 200 ans !

Cependant, au début des années 2000, après à une série d'explorations personnelles lors d'un voyage au Guatemala, un homme du nom de Keith Wilson a renoué avec la plante et a ressenti un appel l'invitant à comprendre le cacao dans sa forme la plus pure. Cette rencontre s'est produite à une époque où le concept de "Cacao de Cérémonie" n'existait pas. Keith a complètement changé son regard sur le chocolat, s'est lancé en quête des « fèves sacrées ». Il s'est mis à essayer de nombreuses fèves, guidé par ce qu'il nomme le « Cacao Spirit », à la recherche des fèves les plus puissantes.

Ses découvertes l'ont ensuite mené à partager le cacao pur avec quelques personnes de son entourage, au Guatemala.
Le mot s'est répandu et en très peu de temps, des dizaines de personnes redécouvraient les effets du cacao, trouvant un nouveau sens à sa consommation. La nécessité d'une désignation appropriée s'est naturellement révélée.

L’impact de Keith a été énorme sur la popularisation du cacao, il a clairement contribuer à booster son expansion. Cependant, il est important de garder à l’esprit que les traditions du cacao étaient encore bien vivantes, préservées et partagées entre certains peuples en amont de son implication.

Mais comment décrire ce cacao autrement que notre archétype moderne du chocolat ?

De "Nourriture de la Transformation" au "Cacao de Cérémonie"

« J'ai demandé une fois au Cacao Spirit quelle était la ‘vision d'ensemble’ , elle m'a alors dirigé vers une revue anthropologique qui citait un mythe ancien :

‘Lorsque l'humanité n'est plus en harmonie avec le monde naturel, le chocolat vient de la forêt tropicale pour ouvrir les coeurs des peuples et rétablir l'équilibre.’

Dans mes premières communications avec le Cacao Spirit, elle se faisait appeler "Nourriture de la Transformation".
Ce cacao accélère votre éveil si c'est là que vous souhaitez aller.»

— Keith Wilson

Chocolat Spirituel – Chocolat Sacré – Cacao Sacré – Cacao de Cérémonie – Fève Sacrée – Nourriture de la Transformation…

Toutes ces étiquettes sont arrivées petit à petit dans le vocabulaire de Keith et de sa communauté grandissante, apprivoisant la boisson et son utilisation.

De nos conversations avec Keith, nous avons compris qu'au début des années 2000, lui et sa communauté avaient définit « Cacao de Cérémonie » en fonction de sa composition et de sa puissance.

"Le cacao de qualité cérémonielle est un cacao qui a la quantité et l'équilibre de composés et d'énergies nécessaires pour soutenir correctement l'esprit du cacao, ou toute autre énergie, y compris votre propre créativité, agissant avec vous, main dans la main."

— Keith Wilson

Les « composés » mentionnés ci-dessus sont la théobromine et la caféine — selon sa définition, une très grande quantité de théobromine couplée à une très faible quantité de caféine crée un ratio responsable de la qualité « cérémonielle » du cacao.

Il n'y a pas vraiment d'explication précisant pourquoi le terme de «Cacao de Cérémonie» a persisté parmi les autres appellations. Ce n'était pas une décision marketing, mais cela résonnait simplement chez les personnes qui ont établi une connexion avec ce cacao.

Au fil des années, avec la popularité croissante du cacao et sans aucune marque déposée de Keith’s Cacao, le terme — et donc sa définition— a grandi et est devenu une appellation à part entière. Label marketing pour les uns, gage de qualité pour les autres, le Cacao de Cérémonie est devenu un véritable segment au sein du marché du cacao/chocolat, lié à une volonté globale de renouer de façon holistique avec sa santé et l'environnement.

C'est maintenant une discussion continue qui doit avoir lieu entre les différents acteurs de ce segment pour se mettre d'accord sur la façon de définir de manière appropriée ce cacao et de décider ce qui peut être qualifié, ou non, de "cérémoniel". Ce qui est sûr, c'est que l'appellation "Cacao de Cérémonie" est maintenant devenu un incontournable et reste, à ce jour, le principal moyen de se référer à ce produit.

Conserver le statut sacré

Nous nous sommes personnellement demandé comment nommer ce cacao, quelle dénomination ferait sens pour nous. Nous avons également dû faire face à cette question venant de nombreuses personnes du milieu ou de notre entourage. Aujourd'hui, nous estimons qu'il est intéressant de conserver le terme "de cérémonie" pour différentes raisons.

Le cacao provient de traditions anciennes, mais il a été colonisé et transformé en chocolat. Pour la plupart des consommateurs, il reste encore une friandise ou un plaisir coupable, et l'industrie du chocolat de masse continue de traiter cette plante et les travailleurs de manière irrespectueuse.

Il nous paraît nécessaire de revoir notre éducation à propos du cacao, et pour cela, nous devons le nommer en conséquence. Cela n'aurait aucun sens de l'étiqueter communément et d'induire que c'est une nourriture banale. C'est ce qui a été fait jusqu'à présent, au détriment de la nature, des peuples et des patrimoines qui lui sont associés.

— Une façon de contourner les idées préconçues et de repenser comment le cultiver, le transformer, le boire, l'utiliser… est de le désigner comme étant de qualité « de cérémonie ».

Désigner le cacao comme étant de grade «cérémoniel» résonne avec son utilisation intentionnelle. Cela suscite la curiosité, apporte une dimension mystérieuse et en quelque sorte sacrée à la plante.

On comprend aisément que ce cacao ne se consomme pas négligemment, et selon nous, c'est un point de départ important pour rétablir le statut originel du cacao dans les cultures occidentales.

D'un autre côté, « cérémoniel » n'est pas un terme dénué d'interprétations. Différentes couches de significations y sont associées et déterminent ce qui est ou n'est pas une cérémonie. Accoler systématiquement au cacao induit que les « cérémonies du cacao » sont LE bon moyen d'accéder à son pouvoir. De plus, cela peut impliquer silencieusement qu’elles ont toujours existé et que nous assistons simplement à leur résurgence, ce qui n’est en réalité pas le cas. Le cacao fait partie intégrante d'une culture et était donc utilisé dans différentes configurations, qui peuvent inclure certaines sortes de cérémonies, mais ne s’arrête pas à ça.

Être prudent, rendre hommage et respecter les personnes qui en ont pris soin depuis si longtemps est essentiel et doit être pris en compte lorsque vient le temps de discuter ce qui est juste dans la façon de désigner ce type de cacao.